Ces beaux noms d’hérésies renvoient à une nature qui s’oublierait assez pour échapper à la loi, mais se souviendrait assez d’elle-même pour continuer à produire encore des espèces, même là où il n’y a plus d’ordre. La mécanique du pouvoir qui pourchasse tout ce disparate ne prétend le supprimer qu’en lui donnnant une réalité analytique, visible et permanente : elle l’enfonce dans les corps, elle le glisse sous les conduites, elle en fait un principe de classement et d’intelligibilité, elle le constitue comme raison d’être et ordre naturel du désordre. Exclusion de ces mille sexualités aberrantes ? Non pas, mais spécification, solidification régionale de chacune d’elles. Il s’agit, en les disséminant, de les parsemer dans le réel et de les incorporer à l’individu.
Michel Foucault Histoire la sexualité, 1 : la volonté de savoir / 1976

29 septembre 2012

allons zenfants...etc...

étudier l'Histoire, l"enseigner plus encore, c'est se rendre compte très vite qu'il ne s'agit pas d'emmagasiner une infinité de faits rapportés par une infinité de textes, mais d'y mettre du sens, son propre sens d'historien, donc de les interpréter subjectivement, en apprenant au préalable à choisir ses sources, les mettre en faisceau, afin d'éclairer un éventuel postulat. la méthode se situe entre l’enquête policière et le marc de café, c'est cela qu'on enseigne.
le fait historique pris isolément est un objet qui n'a d'autre sens que ce qu'on en fait. comme n'importe quel objet : un phallus romain peut orner une savante vitrine bourgeoise autant que reprendre ses fonctions de sex-toy, cela n'influera que sur l'utilisateur/trice.
je prends cet exemple parce que l'utilisation du fait historique dans un discours partisan équivaut la plupart du temps à une démonstration obscène de masturbation intellectuelle publique.
ainsi eûmes-nous à subir ces séances de pornographie extrême lorsqu'il y a une semaine, certains tribuns et re-faiseurs de monde se piquèrent de marquer l'évènement lexical qui fit de la France une République française.
   le fait : jacobin pur et dur, surnommé Le Rectiligne par ses pairs, Jacques Nicolas Billaud Varenne propose à la Convention l'adoption du mot République pour désigner le nouveau régime de la France. cela devient effectif le 22 septembre 1792. l'idée le tient depuis un an déjà lorsqu'il rédigeait une plaquette vantant cette référence à l'histoire romaine.
médiocre littérateur autant qu'avocat sans plaidoiries, la Révolution lui ouvre une belle carrière d'activiste et de théoricien politique. tour à tour ami puis ennemi des plus grands, Billaud, le bien nommé, sauve sa tête en faisant tomber celles des autres lors des Massacres de Septembre. époque pleine d'incertitudes : il est déporté en Guyane en 1795.
je voulais juste rappeler le cadre historique, l'acte de naissance de cette République. dans leur enthousiasme, les Jacobins, en lutte contre les Girondins, ont immédiatement ficelé cette République en la déclarant "Une et Indivisible". dans la foulée Danton fait accepter la peine de mort pour quiconque menacerait cette unité et cette indivisibilité. une menace adressée aux "ennemis" de l'intérieur, pour faire simple les provinciaux dont bon nombre ne parlent pas encore le français, sont tentés de déjà regretter les Provinces d'Ancien Régime, déjà confrontés au centralisme parisien.
ainsi parvient-on a faire coexister sur le même acte de naissance la belle devise de cette République : Liberté Égalité Fraternité, avec une menace de mort, non pas à l'encontre de ceux qui viendrait à ne pas respecter ce qui demeurera une utopie, mais de ceux qui exprimeraient un désir sécessionniste, voire plus modestement autonomiste, par rapport à cet État parisien omnipotent qui demeure la marque de la France et reste un sujet d'étonnement pour nombre d'étrangers.
habitant une région dite "à forte identité"(les brochures touristiques sont ici à l'unisson de celles de la gendarmerie) je vérifie quotidiennement que le concept a toujours autant de mal à franchir des barrières culturelles qui avant d'être des obstacles étaient des éléments de vie locale; ils ne se sont pas élevées contre la loi, mais la loi n'a pas voulu les assimiler et encore moins les reconnaître par la suite. cet aveuglement induit de fait des comportements rigides,colonialistes, répressifs lesquels génèrent à leur tour un particularisme décliné jusqu'à la caricature.
le trait, période de crise oblige, risque de devenir obsessionnel. le besoin de boucs émissaires se fait sentir, le régional ou le roumain, l'arabe, le musulman, le pédé, l'autre en général, ceux et celles qui ont tout simplement envie de vivre leur vie comme ils l'entendent.
cet anniversaire de la République Française m'accable doublement, d'abord je la constate figée dans ses certitudes depuis plus de deux siècles, j'observe aussi que le discoureur de gauche utilise l'Histoire de la même manière et aux mêmes fins que son détracteur de droite. c'est extrêmement décevant en ce qui me concerne.
entendant donc vanter avec brio l'âme de ce peuple fier qui monta, de toutes ses provinces, jusqu'à Verdun défendre la terre commune, je suis persuadé que bien peu pensaient réellement y laisser leur peau, et plus aucun dès le deuxième jour. exalter la beauté de la guerre, même indirectement me révulse, et cette trahison de Jaurès m'indigne.
pour information je conseille absolument la lecture de MURTORIU, un livre de M. Biancarelli paru chez Actes Sud.
et pour demeurer dans l'univers de la guerre juste et unificatrice ce lien de la LDH.
c'est pas gai, dans tous les sens du terme, mais fallait que je le dise!

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